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Plusieurs contes parlent d'arbres dont il suffit de manger les fruits ou les feuilles pour être changer en bête.
Lorsqu'un homme sauvage qui venait de sucer le sang de la sur d'un chasseur
a été tué par celui-ci, il est enterré dans le jardin,
où se montre un arbre si beau que jamais on a vu son pareil;
mais la petite fille ayant mis de ses feuilles dans la soupe de ses frères,
ceux-ci sont métamorphosés en moutons, car l'homme sauvage était
un « Fête » et l'arbre né de lui était aussi
fée.
Après avoir goûter à des cerises un homme devient cheval.
Dans un conte du Canada français, un homme monte sur un figuier
et mange les plus gros fruits;
aussitôt il lui vient une queue comme à un singe;
elle disparaît quand il a mangé de plus petites figues.
Des arbres ou leur fragment influent sur la mémoire ou sur le
sommeil.
Il y avait à Tourville un arbre dont l'ombrage faisait perdre au voyageur
toute possibilité de retrouver sa route et tout désir de la poursuivre;
celui qui s'asseyait dessous y resterait indéfiniment si un passant charitable
ne rompait le charme, en l'éveillant de son sommeil magique, après
avoir mis un de ses vêtements à l'envers.
Les arbres ou leurs fragments produisent d'autres effets merveilleux.
Dans un conte nivernais, une branche de l'Arbre rouge posée sur un fleuve
y forme un pont sur lequel peut passer toute une armée.
Un petit garçon en frappant du pied l'arbre d'or en fait sortir des chevaux tout équipés pour la guerre et de beaux vêtements.
Un pommier donné par les Vents et planté dans un courtil devient un talisman qui procure tout ce qu'on désire.
La vie des saints parlent fréquemment de bâtons qui reverdissent;
c'est ainsi que saint Gudwal, s'étant endormi après avoir fiché
le sien en terre, le vit à son réveil transformé en un
arbre touffu.
D'après une légende saintongeaise, les chevaliers français compagnons de saint Louis qui, le soir de la victoire de Taillebourg, avaient fiché leurs lances en terre, les virent en se réveillant chargés d'une épaisse frondaison.
Un églantier pousse tout près d'une statue de la Vierge
entre les pierres du portail de l'ancien couvent des Catherinettes à
Dinan.
Il existe deux légendes sur l'origine de cet arbuste, très vigoureux
en dépit de la mince couche de terre végétale qui le nourrit
: ce rosier aurait été planté par un frère de St-Jean
de Dieu, il y a très longtemps, bien avant la Révolution.
Suivant une autre version, une jeune fille et un garçon de Saint-Malo
s'étaient promis de s'épouser;
mais les parents refusèrent leur consentement, parce que le jeune homme
n'avait pas une fortune en rapport avec la leur;
pour empêcher toute relation entre eux, le père mit sa fille chez
les Catherinettes.
L'amoureux, au désespoir de cette séparation, se rendit aussi
à Dinan, espérant la revoir, mais il n'y put parvenir, et pour
faire ses adieux à celle qu'il aimait, il déposa un bouquet
de roses sur le portail;
une branche a pris racine et depuis ce temps le rosier existe toujours.
On a vainement essayé de l'arracher, on l'a plusieurs fois coupé,
il continue à repousser, et ni les grands hivers, ni les sécheresses
ne le font mourir.
On a recueilli en France plusieurs versions d'une légende populaire
en beaucoup d'autres pays et dont voici le thème initial :
une femme compatissante qui, d'ordinaire, est la fille ou l'épouse
d'un seigneur avare et dur, est rencontré par celui-ci alors qu'elle
porte des vivres à des malheureux ou à des ouvriers mal nourris.
Il lui ordonne de déplier le tablier où elle cache du pain ou
de la viande;
quand elle obéit, il n'y voit que des objets divers ou des fleurs.
« La dame de Laval, qui fut ensépulturée en l'abbaye
de Clermont (1272), était si aumosnière que souventes fois les
officiers de l'hostel se complaignoient à leur seigneur.
Si advint qu'un jour mon dit seigneur, son mari, la rencontra portant aux pauvres
plein giron de viande, et lui demanda que c'estoit qu'elle portoit ?
Elle répondit que c'estoit couppeaux;
il regarda et ne vied que couppeaux.
Par quoy il la laissa aller et s'en alla faire son aumosne;
puis, quand vint le soir, il lui enquist plus diligemment que c'estoit qu'elle
portoit en son giron, et elle luy dist la vérité, et quand il
connut sa bonté, il la licencia de faire tout ce qu'elle voudroit des
biens de son hostel. »
Le mari de la dame de Ruthye, qui portait dans son tablier deux petits pains
destinés aux pauvres du village, l'arrêta et lui dit :
« Que caches-tu dans ton tablier, et où vas-tu ?
Je vais porter chez le tisserand deux pelotes de fil. »
Le mari ouvrit le tablier, et, au lieu du pain, trouva deux pelotes de fil.
Plus ordinairement les objets miraculeux sont des fleurs, et c'est pour cela que l'on donne parfois à ces légendes le nom de miracle des roses.
La baguette fourchue, encore réputée efficace pour la
découverte des sources, et que les anciens mineurs croyaient propre à
la recherche des filons métalliques, donne des indications d'un genre
différend.
En Haute-Bretagne, celle de coudrier qu'on a tournée du côté
où l'on a son bon ami, ou sa bonne amie, se baisse d'elle-même
vers la terre si on est aimé.
Dans les Vosges, pour retrouver les voleurs, il faut détacher d'un coudrier
de deux ans une baguette fourchue dont les deux branches soient
de l'année.
A Paris rêver qu'on mange du raisin annonce que l'on boira du
vin le lendemain;
dans le pays de Liège, rêver de prunes est signe de nouvelles.
Dans la Creuse, rêver de cerises noires est un signe de deuil;
dans les Vosges, si on croit se débattre dans des ronces, on succombera
sous la griffe des gens de loi.
Les fruits, les feuilles ou les arbres eux-mêmes jouent un rôle
considérable dans les coutumes et les divers actes de la vie humaine
:
dans plusieurs villages du pays de Beauraing, les jeunes filles donnent des
noisettes aux galants qui viennent les voir le jour de l'an, et cet usage
est si bien passé dans les murs que ces derniers, au lieu de dire
:
« Je vais souhaiter la bonne année à une telle »,
disent :
« Je vais chercher mes noisettes. »
Dans les Landes, lorsqu'au repas qui suit une demande en mariage, la jeune fille présente au dessert un plat de noix, c'est signe de refus;
Vers le milieu du XIXème siècle, une singulière pratique
avait lieu à Gaillac, dans le Tarn :
lorsque les époux étaient agenouillés au pied de l'autel,
les assistants faisaient pleuvoir une grêle de noix sur leur dos,
et le premier qui se retournait vers les agresseurs devait être celui
qui, selon les dires des bonnes femmes, apporterait le plus de jalousie dans
le ménage.
Dans les Hautes-Alpes, vers 1840, sur la table dressée à l'entrée de chaque village lorsqu'on savait qu'une noce devait y passer, il y avait deux noix confites, une pour chaque époux, et un verre de liqueur que les époux n'osaient refuser de boire la moitié chacun, ce qui signifiait qu'ils devaient être unis comme les coquilles d'une noix.
Il y a quelques années encore, dans le Maine, la mère qui mariait
son dernier enfant s'attachait au dos, le soir du bal des noces, un petit sac
rempli de noisettes rousses, et où se trouvait un trou étroit
qui laissait passer les noisettes une à une;
elle dansait jusqu'à ce que la dernière fût tombée.
Plusieurs récits racontent en quelles circonstances des plantes ont
subi, postérieurement à la création, des changements notables.
Ceux qui s'attachent au blé ont été inspirés
par la disproportion qui existe entre le chaume de cette céréale
et sa graine.
D'après le thème le plus ordinaire, tout en poussant aussi haut
qu'aujourd'hui, il n'était qu'épi;
Dieu l'a réduit à sa dimension actuelle pour punir les humains
de leurs péchés ou de leur paresse.
Des herbes ont été bénies ou maudites en raison
des actes que leur attribuent des traditions qui parfois leur accordent une
sorte d'animisme.
La Vierge, fuyant la colère d'Hérode, dit à un laboureur
qui semait du blé d'aller chercher sa famille pour le couper;
le paysan sourit d'abord, mais il se laissa persuader, et quand il revint avec
les siens, le blé était mûr.
Il le faucha, et la Vierge se cacha sous les herbes avec son enfant, en recommandant
au paysan de ne pas la trahir.
Les tiges de blé n'étaient pas assez longues, et l'on apercevait
un pan de son manteau;
mais les branches des sauges et des basilics qui l'entouraient
se penchèrent, s'entrelacèrent et formèrent un faisceau
qui protégea Marie.
A quelque pas se trouvait une touffe de menthe. Tout à coup Hérode
survient avec ses cavaliers, et demande si l'on a pas vu une femme et un enfant.
« Si, répondit le laboureur, mais c'était au moment des
semailles.
Alors elle doit être bien loin » dit Hérode,
et il s'élança à sa poursuite.
Heureusement, il n'entendit pas un geai, et une menthe qui disaient :
« Sota la garberota ! sous la gerbe. »
La mère de Jésus dit à la menthe :
« Tu es menthe, et tu mentiras toujours; tu fleuriras, mais
tu n'auras pas de graines. »
Puis s'adressant au basilic, elle lui dit :
« Basilic, Dieu te sauve, tu fleuriras, et tu auras des graines.
»
Depuis lors, il est la plante favorite des jeunes filles qui en accrochent un
bouquet à leur corsage.
On raconte à Saint-Amand (Cher) que la farsetia clypeata, appelée
herbe de Jérusalem, herbe des Croisades, et qui semble n'exister
que dans cette localité, y a été apportée de Palestine
par un croisé dans les sabots de son cheval;
celui-ci, ayant frappé violemment le sol en passant près d'une
forteresse qui existait alors à Montrond, on y vit, peu de temps après,
une petite étendue de terrain couverte d'une plante inconnue.
Le jour de la Saint-Jean, au soleil levant, un lys d'or émerge
au milieu de l'étang des Aunais, près de Candé (Maine-et-Loire);
son apparition cesse dès que le soleil s'élève au-dessus
de l'horizon; des vieillards affirment l'avoir vu, mais ils disent que depuis
quelques années ce prodige ne se montre plus.
L'usage de faire bénir les semences subsiste encore dans beaucoup
de pays.
Ordinairement les cultivateurs apportent à l'église un échantillon
qui, après avoir été aspergé d'eau bénite,
est mélangé à la quantité préparée
pour l'ensemencement.
La coutume, signalée au XVIIème siècle, de porter dans la nappe qui a servi le jour de Noël le blé de semence afin qu'il vienne mieux, est conservée en Périgord.
En général on n'ensemence que les terrains sur lesquels le soleil
répand sa lumière et sa chaleur.
Dans le pays de Bayeux, l'oubli de ce précepte avait des conséquences
dangereuses en ce qui concerne le persil : semé à l'ombre,
il pouvait se changer en ciguë.
La croyance si répandue à la fascination féminine existe
aussi en matière de semailles;
dans le Tarn, il faut se cacher d'une femme quand on sème des melons,
où ils ne seraient pas mangeables.
Quelques observances augurales se rattachent à la récolte future.
En voici l'une d'elles;
« Avant de semer ton lin, envoie ta femme (aux champs) sur les
genoux;
et si ses genoux enflent, tu es sûr d'avoir d'excellent lin. »
En Lorraine, pour récolter des carottes aussi grosses que la
cuisse, ceux qui les sèment ont soin de toucher fréquemment cette
partie de leur corps;
quelques-uns prononcent aussi ces paroles :
« Gros comme ma cuisse, long comme ma cuisse. »
Aucune plante potagère ne tient plus de place dans le folklore que le
persil :
Au XVIIème siècle, on le faisait semer par un enfant, par un imbécile,
par un insensé ou par quelque autre personne qui n'avait point de chagrin,
dans la créance qu'il venait mieux que s'il était semé
d'une autre main.
Cet usage est encore pratiqué dans la Beauce et en Périgord.
Aussi, bien des gens en semant le persil font des grimaces ou des gestes
désordonnés comme ceux des fous.
Suivant une superstition très répandue, on s'expose à des
disgrâces pour soi ou pour les siens en transplantant le persil
: au XVIIème siècle, celui qui le faisait mourait dans l'année.
Dans la Meuse : « Qui plante persil, plante mari », c'est-à-dire
creuse une fosse pour le maître de la maison.
La superstition d'après laquelle il est bon de jurer, au moment
où l'on confie des semences à la terre, n'est peut-être
qu'une survivance des conjurations religieuses usitées autrefois.
Au XVIème siècle, elle s'appliquait à deux plantes :
« L'on dit chose admirable du basilic qu'il croît plus haut et plus
beau s'il est semé avec malédictions et injures : il en est de
même de la rue et du cumin. »
En Wallonie, le lin réussira si les femmes dansent au soleil
le jour de la Chandeleur;
au dire des gens de Dammartin, il est indispensable, pour que le chanvre
soit haut, qu'elles se saoulent le soir des Brandons.
Les plantes sont exposées à la fascination, non seulement quand
on les sème, mais encore après qu'elles sont sorties de terre.
Dans le Mentonnais, la courge montrée avec le doigt séchera;
les cultivateurs provençaux disent aussi qu'elle craint les illades.
En Poitou, les morilles ne grandissent plus une fois qu'on les a aperçues.
En Périgord, l'il de l'homme fait moisir et tue les champignons.
Dans la Gironde, si une femme va ramasser des cèpes pendant ses
jours menstruels, il n'en repoussera plus, au moins pendant une année,
dans les bois où elle les auras cueillis;
elle fait flétrir et mourir tous ceux qui se trouve dans la forêt
quand elle y entre.
Aux environs de Dinan, lorsqu'elle a touché du bout du doigt une feuille
d'absinthe, toute la plante semblera mourir;
mais peu de temps après elle reparaît à dix mètres
plus loin;
« l'herbe sainte » est allée se purifier sous terre
pour se montrer ensuite plus vigoureuse que jamais.
Les plantes sont aussi soumises à des influences diverses :
si le persil réussit bien dans un jardin, on dit en Poitou que
le jardinier est bon étalon, ou qu'il n'y a pas de jaloux dans la maison.
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