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On le nommait aussi : feu de saint Nicolas ou feu de sainte Anne, divinités
favorables aux marins.
Actuellement, il est surtout connu sous le nom de feu Saint-Elme.
Ce bienheureux figure en personne dans une des explications légendaires
de son origine.
Les marins des environs de Saint-Malo racontent qu'il errait au gré des
flots dans une barque, désemparé, quand il fut recueilli
par un capitaine. Comme celui-ci ne voulait pas être payé de ce
service, le saint, pour le remercier, lui dit que lorsque la tempête serait
proche, il enverrait un feu pour prévenir les matelots.
Suivant une autre opinion commune aux matelots bretons et à ceux de la Saintonge, les feux qui se présentent à bord des navires sont des marins noyés qui reviennent sur ceux où ils ont servi pour solliciter un souvenir dans les prières.
En Normandie, le vent est le bonhomme Hardy qui ouvre les fenêtres de force.
Les récits du littoral de la Haute-Bretagne parlent des Vents comme
de personnages très réels.
Plusieurs racontent même en quelles circonstances ils sont venus sur la
mer où jadis ils ne soufflaient pas comme aujourd'hui.
L'une d'elles, qui fait songer aux vents enfermés dans des outres et
donnés par Eole à Ulysse, rapporte qu'un capitaine, débarqué
seul au pays des Vents, les fit entrer dans des sacs bien clos, et les rapporta
à son bord, sans dire à ses hommes ce qu'ils contenaient, mais
leur défendant d'y toucher.
Pendant qu'il dormait, un matelot eut la curiosité d'ouvrir un des sacs;
Surouâs (sud-ouest) s'en échappa, et souffla si fort que le navire
fut brisé, et que des sacs crevés s'échappèrent
les sept Vents qui, depuis, ont toujours soufflé sur la mer.
La croyance à l'efficacité de siffler pour appeler le vent est répandue dans nombre de pays.
Lorsqu'il fait calme plat, les matelots trécorrois croient que saint
Antoine, patron du vent, est fâché ou endormi;
ils se mettent à blasphémer pour le réveiller et, comme
il a défendu de siffler en mer, ils sifflent de toute leur force;
ceux du Finistère et de la Manche française lui adressent des
conjurations, très irrespectueuses, qui sont aussi accompagnées
de sifflements.
Les matelots terre-neuviens se réunissaient autrefois sur le pont, et
ils prononçaient tous à haute voix le nom du vent qu'ils désiraient.
Certains capitaines de la Manche faisaient de même en tirant à
balle sur les nuages.
Dans l'ancienne marine, on fouettait les mousses pour faire cesser le calme; au XVIIème siècle, cette pratique était en usage, même sur les vaisseaux de l'Etat, où c'était une coutume d'obliger les mousses à se donner le fouet les uns aux autres.
Sur les côtes de Normandie, les femmes des pêcheurs dont le retour ne s'effectuait pas dans les délais ordinaires brûlaient un balai neuf pour faire changer le vent.
On parle encore sur nos côtes des cordes à tourner le vent;
Il s'agit de cordes munies de nuds qui, suivant qu'on en défaisait
un ou plusieurs, provoquaient la brise, le vent ou la tempête.
En Wallonie, le curé peut détourner le vent en plaçant la pointe de son tricorne du côté où il veut qu'il souffle.
En Haute-Bretagne et en Saintonge, si l'on fait des grimaces ou si l'on bâille quand le vent tourne, la bouche reste dans la position où elle était quand le vent a changé.
On croit, dans le Léon, que s'il survient de grands coups de vents,
ce sont les tourbillons des damnés qui, dans leur rage, s'efforcent
de nuire aux hommes.
Il faut se jeter immédiatement le face contre terre pour éviter
que ces âmes méchantes ne vous enveloppent, vous étourdissent
et vous entraînent à leur suite dans l'enfer.
Dans l'Albret, les bouffées violentes de vent sont les âmes des
petits enfants morts sans baptême;
on a vu parfois après leur passage, des taches de sang sur le
linge étendu à sécher.
Aux environs de Fougères, une tempête de vent indique qu'une personne s'est pendue ou noyée dans le voisinage et que le démon est venu la chercher.
Il arrive du mal à ceux qui veulent contrarier leur course.
Un mauvais plaisant, ayant commis cette imprudence, vit à la place du
tourbillon un jeune homme qui lui dit :
« Pourquoi m'arrêtes-tu ? »
Le moqueur tomba malade et mourut dans l'année.
Quand le vent est violent, les ouragans sont parfois assimilés à
des serpents, et les Bas-Bretons parlent assez fréquemment des
dragons de vent.
Les tourbillons, surtout ceux qu'on appellent dragons, sont très redoutés
des marins du Trécorrois et du Finistère qui les accusent de balayer,
avec leur queue traînant au ras de l'eau, tout ce qui leur fait obstacle;
ainsi s'expliquent tant de disparitions subites.
En Haute-Bretagne, il est dangereux de se trouver sur leur passage, car certains supent un navire comme un homme avalerait un uf.
On croit dans le Finistère que l'on se débarrasse des rhumatismes
en se dépouillant quand un orage vient à éclater,
et en se présentant couché sur le ventre, son corps nu à
l'averse, tant qu'elle voudra durer.
En Haute-Bretagne, celui qui peut ramasser les premières gouttes
de pluie qui tombent le jour saint-Laurent y trouve un remède assuré
contre n'importe quelle brûlure.
Le plus ordinairement, les pronostics tirés de la pluie sont en relation
avec le mariage.
Celle qui tombe le jour où il s'accomplit semble en quelques pays être
considérée comme une sorte de punition infligée aux jeunes
filles gourmandes.
Dans la Gironde et dans la Montagne Noire, le même sort attend celle qui
a l'habitude de frotter la poêle avec un morceau de pain après
en avoir tiré ce qu'on y a fait cuire.
Les idées qui s'attachent à la pluie qui coïncide avec cette
cérémonie sont variées, et parfois contradictoires :
- à Marseille, on la considère comme un signe d'abondance
dans la maison du couple uni;
- en Savoie, la mariée sera économe;
- à Dinan, elle sera heureuse; les larmes qu'elle aurait du verser tombent
ce jour-là, et si la pluie est accompagnée d'un rayon de soleil,
on dit : « Voilà la mariée qui rit. »
- En Ille-et-Vilaine, c'est un présage de fécondité,
de même que dans le Mentonnais et dans les Vosges, où de plus la
fortune des enfants sera assurée;
- en Saintonge, s'il pleut du matin au soir, l'épouse recevra plus de
coups que de caresses;
- en Poitou, elle sera battue ou versera autant de larmes qu'il tombe
de gouttes d'eau;
- dans la Gironde, la mariée sera gourmande;
- dans le Maine, elle ne sera pas propre;
- à Laroche, on dit malicieusement des époux qui se marient sous
la pluie qu'ils ont mangé le chou au pot, c'est-à-dire
qu'ils ont eu des rapports avant l'union légale.
Aux environs de Grenoble, pour faire cesser la pluie, on verse une bouteille d'huile dans un ruisseau qui se rend à la mer.
Lors de son voyage d'Irlande en Bretagne, saint Lunaire, alors qu'il
se trouvait en pleine mer, son bateau fut entouré d'une brume si épaisse
qu'il ne pouvait reconnaître son chemin; il se mit en colère, lui
lança son sabre comme à une ennemie, et dès qu'il
l'eut fait, elle disparut.
Depuis ce temps, les marins l'appellent le patron de la brume, et ils l'invoquent
quand elle les incommode.
L'expression « brume à couper au couteau » se rattache peut-être
au souvenir de ces pratiques, où intervient le fer, métal
odieux aux esprits, qui figure dans un conte gascon, où le héros
tue avec son épée le Géant de brume, qui aussitôt
s'en va en fumée.
On a recueilli dans la région des Pyrénées plusieurs conjurations
où l'on essaie de faire peur à la brume.
Ex : « Brume, brume, sors de la plaine - sinon le bourreau veut t'étrangler
- avec sa chienne et son chien. »
Lorsque les paysans du Lot entendent un coq chanter à minuit, ils remuent des cendres ou font une croix dans la cheminée pour qu'il n'y ait pas de brouillard le lendemain.
Quelques pays des Vosges sont, par la vertu d'un saint local, préservés
du brouillard de longue durée.
Aux environs d'une fontaine que saint Dié fit jaillir, il ne dure
jamais plus de vingt-quatre heures, et la ville qui porte le nom du saint jouit
du même privilège.
La rosée possède une grande vertu à des époques
déterminées : celle de mai est surtout réputée;
en Poitou, les jeunes filles, pour avoir le teint frais, se lavent la
figure, le premier jour de ce mois, avec celle qui perle sur les herbes;
on disait même que quelques-unes, afin d'être plus belles de tout
leur corps, s'y roulaient toutes nues;
pour avoir la peau fraîche, les jeunes saintongeaises ne manquaient pas
chaque matin de se débarbouiller avec la rosée.
Dans les Vosges, celle du matin de la Saint-Jean fait disparaître
les taches de rousseur, efface les rides, et conserve la fraîcheur du
visage.
Son efficacité n'est pas bornée aux taches épidermiques;
elle s'étend jusqu'aux maladies cutanées;
au commencement du 19ème siècle, elle passait dans le pays chartrain
pour guérir la gale.
En Béarn, ceux qui sont atteints de quelque maladie de peau se roulent,
le matin de la Saint-Jean, dans les champs d'avoine humectés d'une abondante
rosée.
En Normandie, le malade va, à l'aurore, se rouler dans l'herbe humide, et la rosée de la Saint-Jean le rend aussi net qu'une tasse d'argent.
En Normandie, on attribue à la rosée de mai une action analogue
sur les choses;
elle enlève les rousseurs du linge qui y a été exposé.
D'après une pratique relevée en Saintonge, son pouvoir s'étendait
jusque sur les choses du cur;
les amants qui n'étaient pas payés de retour allaient se rouler
tout nus dans l'herbe humide de rosée et croyaient ainsi calmer les rigueurs
de leur inhumaine; cela s'appelait prendre l'aigail de mai.
Dans la partie bretonnante des Côtes-d'Armor, la femme qui veut dérober le beurre court toute nue dans les champs, emplissant sa baratte de rosée prise à ses voisins (détails : page eaux douces 6 - sorciers et démons)
Quand il éclaire, on dit en Wallonie que le bon Dieu allume sa pipe;
mais on rencontre dans ce même pays une autre explication moins prosaïque
:
lorsqu'il tonne, le ciel s'entrouvre et l'éclair est formé
par la lumière du Paradis se précipitant par la fente.
On pourrait jeter par cette ouverture un regard dans le séjour
des bienheureux, mais celui qui aurait cette audace serait à l'instant
même frappé de cécité.
En Normandie, les petits pêcheurs qui se trouvaient sur la plage ne craignaient pas cependant de regarder le ciel à l'endroit où il était déchiré par un éclair;
quelques-uns prétendaient, par cette fente, voir dans un coin du Paradis la figure de la Vierge.
La cause de la foudre est si mystérieuse et si terrible que Dieu n'a
pas voulu la dévoiler, même à ses disciples.
On dit en Franche-Comté que, lorsqu'il instruisit les Apôtres,
l'un d'eux eut l'indiscrétion de demander ce que c'était que le
tonnerre;
saint Pierre répondit : « Je vais te l'écrire »;
sur quoi Jésus, lui retenant la main, répliqua vivement :
Arrête, Pierre,
Si l'homme sur terre
Savait ce qu'est le tonnerre,
Il deviendrait cendre et poussière.
Saint Jean, disent les paysans du Puy-de-Dôme, demanda à Dieu
la permission de voir le tonnerre :
« Je ne le puis, répondit le bon Dieu, tu mourrais de frayeur.
»
Saint Jean répliqua qu'il avait vécu au milieu des bêtes
sauvages et que rien ne l'avait fait trembler.
Dieu finit par lui montrer ce qu'il désirait;
saint Jean fut foudroyé, et n'en mourut pas, mais toute sa vie il fut
atteint du mal caduc.
D'après une variante du Nivernais, lorsque saint Jean envisagea le tonnerre,
il fut ébloui et jeté à terre;
c'est l'origine de l'épilepsie ou mal Saint-Jean;
Le bon Dieu, voyant que le tonnerre était si effrayant, voulut qu'un
éclair précédât désormais le coup pour
servir d'avertissement.
On était naguère persuadé que le curé avait le
pouvoir de détourner l'orage par des signes accompagnés
de prières.
Dans nombre de communes des Hautes-Alpes, au commencement du XIXème siècle,
quand le temps était mauvais, on forçait le curé
à l'exorciser.
On faisait le plus grand cas du pasteur si ses paroles et ses cérémonies
avaient un résultat avantageux.
On le prenait en haine, si par malheur un orage enlevait des terres ou si la
grêle détruisait la récolte.
Ces désastres se renouvelaient-ils, il était contraint à quitter le village.
Les pierres éclatées ou taillées, que le vulgaire attribue à la foudre et qui portent des noms en rapport avec cette idée, passent pour garantir du tonnerre les édifices où elles se trouvent ou les individus qui les portent sur eux.
Dans plusieurs pays de France, on a constaté la coutume de placer ces instruments, soit sous les fondations ou le seuil des maisons, soit dans une partie plus apparente de l'édifice, et ceux qui agissent ainsi leur attribuent une vertu analogue à celle des paratonnerres.
Jadis, dans la partie maritime de l'arrondissement de Dinan, beaucoup de gens
mettaient des pierres à tonnerre dans leur poche quand le temps
était à l'orage et il récitaient cette oraison qui, vers
1880, n'était pas encore complètement tombée en désuétude
:
Pierre, pierre,
Garde-moi du tonnerre.
Dans le centre de l'Ille-et-Vilaine, où cette pratique subsiste peut-être
encore, on y associe le nom de deux saintes qui figurent dans un grand
nombre de conjurations chrétiennes : Sainte Barbe et sainte Fleur.
Dans le pays basque, quand un orage éclate, il n'est point de meilleur préservatif que de placer en dehors de la maison un instrument tranchant, hache ou faux, le fil tourné vers le ciel.
Dans la Gironde, on pose extérieurement devant la porte un trépied
en fer;
en Poitou, on tourne en l'air les trois pieds d'une marmite.
Les fragments de la bûche de Noël et les tisons des
feux de la Saint-Jean et de la Saint-Pierre passent aussi pour mettre à
l'abri de la foudre les maisons où ils sont conservés, surtout
lorsqu'on les tire de leur cachette au moment des orages, en prononçant
certaines paroles.
La croyance a été constatée tant de fois en France qu'on
peut la considérer comme générale.
D'autres actes semblent se rattacher à l'idée que la foudre est
conduite par un être vivant que l'on peut effrayer.
A l'approche d'un orage, les faucheurs de l'Yonne faisaient très souvent
résonner leur faux, et les vignerons, suspendant leur hotte à
des branches, frappaient dessus à coups redoublés avec des échalas.
En Franche-Comté, si, lorsqu'on entend tonner pour la première fois, on se roule par terre en répétant à deux reprises : « J'en ai mangé », on sera préservé de la foudre pour toute l'année.
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